dimanche 6 mars 2016

Immersion à Livingstone, Zambie

Ivor, le sourire jusqu'aux oreilles et les yeux pétillants nous accueille chaleureusement et nous emmène chez lui, dans le quartier de Dambwa. Ce couchsurfing était déjà pour moi le clou du voyage avant de partir, je savais qu'il travaillait à monter une école dans un village. Mais les changements de cap au mois de décembre nous ont détourné de cette aventure, et pour la bonne cause puisque Tristan a trouvé. Mais j'avais toujours cette idée en tête d'aller passer quelques jours dans cette famille, et lorsqu'on a décidé de sortir du Botswana, c'est la première option qui m'est venue à l'esprit.

A peine sorti du centre ville on traverse des quartiers très animés de la vie locale, de petites échoppes en tôles, du bitume défraîchi, des femmes qui portent des paniers sur la tête, et/ou des bébés en écharpe, et puis cette ruelle de terre rouge, à moitié inondée par la pluie de la veille.

C'est là qu'on s'arrête, devant un enclos de plusieurs maisons locales, imbriquées les unes aux autres. Les enfants de la ruelle accourent tous autour de la voiture, essaient de toucher nos filles, leurs cheveux et de leur parler. Certains se présentent à nous : « Bonjour, moi c'est Patrick, comment ça va ? ».

Puis Ivor nous montre sa maison, 2 pièces avec 2 grands lits, pleine de meubles et sur une table un peu bancale, la cuisine avec un four et 2 plaques, sur lesquelles on prend le jus si on n'a pas de chaussure, aïe, ça pique. 

La cuisine
On fait la connaissance de sa femme Sillar, et ses 2 enfants Siphiwe (prononcer Spiwe) qui a 5 ans et Pillar, un joli bébé tout rond de 8 mois. Eux vont dormir dans une pièce séparée à côté, un autre bout de la maison.
Siphiwe, la future meilleure copine de Galane
Ce soir il y a église! ils nous proposent de les accompagner mais on a envie de se relaxer un peu, on sait qu'on aura d'autres occasions dans la semaine, alors on reste pour prendre possession des lieux. Les enfants ne nous lâchent plus, Galane s'éclate à courir partout avec eux pendant que certains restent papoter avec nous, Anémone est encore agrippée à nos jambes, pas pour longtemps.

Ils reviennent et on mange ce que j'ai préparé (pâtes aux poivrons, comme d'hab), à l'intérieur parce que les enfants de la rue sont toujours collés à nos basques, il fait chaud. On met les filles au lit, toutes excitées par ce nouvel endroit, cette nouvelle expérience qui a l'air de bien leur plaire, en plus sous la moustiquaire, encore une occasion de faire les fofolles. Nous on rêve d'une douche que nos hôtes s'affairent à nous prépare pendant qu'on essaie de calmer les filles.

Les toilettes sont communs à l'enclos, à plusieurs mètres derrière la maison, dans un bloc avec les douches. Enfin ce qu'il en reste, c'est-à-dire une pièce ouverte, avec une évacuation. Il y a un robinet d'eau courante unique sur l'enclos, et encore quand il marche. Donc on conserve l'eau dans de grandes cuves, des bassines en tout genre.
Sillar m'emmène avec une lampe torche et un tissu qu'elle accroche sur le devant de la pièce, la bassine est là qui m'attend avec un godet pour m'arroser. Ah mais quel bonheur après cette journée chaude et toutes ces émotions, malgré l'obscurité dans ce lieu inconnu, et cette douche à l'ancienne que je n'avais pas revécu depuis le Vénézuela. Et malgré la chaleur de ces maisons sous tôles, et quelques craintes sur la sécurité des installations électriques et l'hygiène des communs, je me sens bien ici, je crois qu'on va passer un bon séjour.



Les bains dans la bassine sur le perron ravissent les filles. Les petits plats de Sillar sur le brasier devant la maison, manger avec les mains, laisser le temps passer tranquillement en regardant les enfants s'amuser, échanger quelques mots avec les voisins qui passent ou aller remplir des bassines d'eau et faire la lessive à la main... Que de plaisirs simples qui m'enchantent. Et puis ces sourires, Sillar, toujours agréable et serviable, Ivor qui nous raconte sa vie dans la mine, les différentes cultures de son pays, ses projets aussi.



La chef au brasier
 












Il nous emmène dès le premier jour dans le village où il a créé cette petite école avec le soutien des villageois. Elle permet aux enfants qui ne sont pas en âge d'aller en primaire d'apprendre les bases, avec rien ! 


L'institutrice est une jeune femme bénévole du village, qui porte son bébé sur son dos, les enfants n'ont même pas tous un cahier, certains ont de vieilles feuilles déjà bien utilisées, d'autres rien du tout. Au début on est un peu gêné d'interférer en plein milieu de la leçon, les enfants sont dissipés, et puis on se met au fond et la classe reprend son cours. Timidement j'essaie de les aider, et puis je me lance au tableau, je passe dans les rangs. Certains sont très intimidés peut-être même effrayés quand je leur parle, d'autres au contraire m'interpellent. Quel moment hors du temps ! 


 Et puis c'est la pause, distribution des petits biscuits qu'on a amené, Tristan commence une partie de foot, Galane et Anémone se mèlent dans la foule. 















Toute cette petite cohue nous suit partout ensuite dans notre traversée des « hameaux » du village, assez éloignés les uns des autres, ils regroupent une famille et toutes ses générations dans un même endroit, avec des huttes, des greniers, des poulets (bicyclette?). On s'arrête au goyavier où les enfants cueillent et nous offrent plus de goyaves que notre estomac ne pourra supporter, tant pis on se régale et surtout les filles (qui se tapent une bonne « tourista » le lendemain, rien d'inquiétant heureusement).


cache-cache

ils s'entraînent à prendre des photos, assez réussies!
 







Puis on arrive au hameau du chef du village, qui nous attend avec une bière locale artisanale, dont la couleur et la texture et même le goût rappellent plus le café au lait que la bière. Puis l'un d'entre eux passe nous verser de l'eau sur une bassine pour qu'on se lave les mains avant le repas : de bonnes galettes d'Nshima (préparation à base de farine de maïs dont on raffole tous), et une ratatouille d'aubergines zambiennes (toutes petites et blanches). Le Nshima se découpe et se roule en boule de la main droite, et sert de couvert pour attraper les autres ingrédients, pas toujours évident, mais on prend le coup avec le temps.


Galane, la petite fermière, donne du foin aux animaux

la hutte du chef, magnifique propriété

L'adorable Pillar, qui jamais ne pleure
L'un des chefs du village tisse une écorce pour en faire de la ficelle, on nous explique comment sont faits les toits, on apprend que les femmes partent parfois vendre les récoltes en ville, c'est-à-dire au moins 45 min de marche pour sortir du « bush »puis le bus, etc. Les enfants aussi marchent plusieurs km matin et après-midi pour aller à l'école, c'est très courant ici. Et puis l'eau se pompe à certaines stations, on en a croisé 3, toujours entourées de monde, de femmes qui viennent chercher de quoi laver, faire à manger, d'enfants qui boivent, d'hommes qui remplissent des bassines. Au hameau où l'on est, on voit justement arriver une cariole tirée par des ânes qui vient les approvisionner.








Bref, on parle de la vie du village, et aussi de ce garçon de 9 ans que le chef a recueilli et qui ne réussit pas à l'école, il reste au village pour aider. Et de ce gars qui s'est installé pour un temps, a engrossé 2 soeurs (dont une de 14 ans) et a pris la fuite. Pas facile de se marier pour elles maintenant... La solidarité familiale, et celle du village sont d'autant plus importantes dans ces conditions de vie. Faut dire qu'ils vivent ensemble, malgré des cahutes distinctes pour les couples, et une pour les enfants (!!). Ils sont tous élevés ensemble et par tous, ils s'élèvent les uns les autres aussi, les plus grands prenant en charge les plus petits. C'est surprenant de voir l'habileté avec laquelle les filles de l'âge de Galane manipulent les bébés. Et puis ils jouent, ils jouent, en ville aussi, comme nous avait expliqué Ivor, on ne prend même pas la peine de les appeler pour les repas, ils rentrent quand ils ont faim, on ne leur fait pas faire de sieste, ils la font quand et là où ils s'endorment, on ne les pousse pas au lit le soir à 20h02 non plus. Un côté tentant mais un peu anarchique quand même...













Ah, ce qu'on est bien sous cet arbre à regarder ou imaginer cette vie bien différente. J'y ferais bien la sieste, le paysage est magnifique, le hameau aussi avec ces charmantes petites maisons. En fait j'aimerais bien y passer quelque temps dans ce village... Mais on rentre sur Livingstone, retrouver les enfants de la ruelle et passer une soirée agréable avec nos hôtes.
Ce soir là c'est Nshima (Nshima un jour, Nshima toujours!) avec de la friture de poisson (qu'ils achètent séchés), et des feuilles genre épinard (ils en ont tellement de variétés, des feuilles de patate douce aux feuilles d'okra, que je m'y perds). Les 3 filles se partagent une assiette, assises sur le porche des voisins, elles s'entendent comme des larons en foire, et se régalent elles aussi.

Les copines bien fatiguées de leur journée
Le lendemain, Ivor et sa famille nous emmènent aux chutes Victoria ! Avec l'inertie de groupe, on y arrive assez tard alors on ne fait que la traversée du pont, frontière avec le Zimbabwe, d'où on a déjà une vie exceptionnelle. 






Et puis c'est là que les plus fous sautent à l'élastique, un des plus hauts spots du monde. Ah c'est impressionnant de les voir s'élancer, bouh, j'ai mon quota d'émotion, la balade aux chutes ce sera pour une autre fois.



Les babouins sont partout
On tente l'entrée à l'hôtel chic d'à-côté où apparemment on peut se baigner à l'oeil dans la piscine, mais on se fait rappeler à l'ordre. On a quand même le loisir d'approcher des zèbres que l'on voit débarquer les uns après les autres derrière un des hébergements. Ils font partie des 5 zèbres et 3 girafes que possède l'hôtel pour le plaisir de leurs invités, sympa.


Et puis on fait du repérage, à la plateforme des tours en hélico, d'où on aperçoit la brume générée par les chutes, puis au parc des « big five » (les plus gros animaux d'Afrique). On peut y faire des balades à dos d'éléphant, marcher avec les lions, caresser les léopards, pour des tarifs plus ou moins élevés. On se contentera juste d'observer les lions et léopards en cage, Grroarr !
"The smoke who thunders" (la fumée qui tonne)

 Pour terminer la journée, on va boire un pot dans un des lodges au bord du Zambèze.

Une excellente journée en familles, encore!

Le jour suivant (pff mais quel programme !) Ivor nous a emmené avec Spiwe en ville pour boire un café Zambien, faire le tour du grand marché, et visiter le musée. Qui d'ailleurs vaut le détour, surtout si vous êtes guidés comme on l'a été.
Petit arrêt réparation de voiture,
les copines ne sont jamais à cours d'idée pour se marrer,
malgré les étapes parfois laborieuses


On aime la pluie qui rafraîchit
 


Petite coupe dans une cabane en bord de route


Et le dimanche on les a finalement accompagnés à l'église, tout le monde sur son 31. Les enfants jouent dehors, ou ont un petit cours de caté, pendant que les parents vont au spectacle.


Enfin pour moi c'était le cas, un groupe de chanteurs, dont le principal change à chaque morceau, plus enflammés les uns que les autres, des musiciens ? En tous cas un batteur, c'est sûr, qui bat la mesure des émotions. Et ces gens tous ces gens qui prient, qui chantent, qui lèvent les mains au ciel, ou serrent les poings, qui hurlent même... Je suis envoûtée, à demi-consciente de l'effet Disney, et les larmes finissent par arriver. C'est surtout que la coupe est pleine, on a vécu tellement de belles choses ces derniers jours, et vu aussi beaucoup de souffrance et de voir ces gens se soulager de leurs maux, c'est juste... tellement que j'en ai encore les larmes aux yeux en y repensant 10 jours après ! Et puis c'est le dernier moment de notre séjour avec cette famille, même si on sait qu'on se reverra.

Allez, on va se reposer à l'hôtel...

3 commentaires:

  1. MERCI,merci Aurélie. Nous aussi on a pas envie que tu laches le crayon. Nous ici, en te lisant nous nous retrouvons quelques longues années en arrière et je comprends ton émotion que tu transcrit très bien. Beau séjour en effet et quelles belles balade. je me plais a imaginer les filles, Galane surtout quel plaisir pour elle quel apprentissage de la vie. Et Tristan lui aussi doit avoir quelques souvenirs qui reviennent...Je sais que je vais lire et relire ces journées Merci. Bon voyage encore, et patience.
    Bises a vous quatre

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  2. oh oh c'est vrai que ca fait remonter des souvenirs tt ca! un petit gout de deja vu bien sympathique! et Tristan fait tres couleur locale assis sur sa chaise avec tous les hommes sous l'arbre! il est chez lui dis donc! quant a toi, c'est juste la couleur de cheveux qui denote, a part ca, tu es chez toi aussi! c'est top tout ca, ca donne envie de venir! et quels coach surfeurs sympathiques et originaux! plein de bisous a vous 4

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